lundi 13 novembre 2023, par
Dans un récent rapport, la Cour des comptes s’est attaché à analyser la concurrence qui s’exerce entre les structures hospitalières publiques et privées. Elle cible, dans ce document, le manque de coordination pour la permanence des soins, une pertinence des hospitalisations à revoir, ainsi que l’activité libérale des praticiens hospitaliers, entre autres.
Le secteur de l’hospitalisation est, en France, très marqué par la concurrence que se livrent le secteur public et le secteur privé. Il résulte de cette dichotomie et des dispositions législatives régulant les modes de financement des activités hospitalières des différences significatives quant aux activités assurées par les uns et les autres.
Une concurrence effective dans les domaines des urgences et des délais d’accès aux soins notamment
La Cour des comptes a souhaité étudier de plus près cette concurrence en ciblant 20 types de pathologies MCO les plus couramment prises en charge. Le rapport qu’elle a publié dans ce cadre en octobre 2023 avance que les établissements publics offrent 66 % des lits et places, les établissements privés à but lucratif 25 % et les établissements privés à but non lucratif (ESPIC) 9 %. Elle a mesuré le nombre de séjours effectués en métropole et a caractérisé́ l’intensité́ de la concurrence en fonction de l’activité́ respective des trois catégories d’établissements.
Sans surprise, on y apprend que le secteur public assure de plus en plus, et presque exclusivement, la couverture des besoins sur l’ensemble du territoire ainsi que les soins pour les pathologies les plus sévères, ou dans les contextes sociaux les plus difficiles. Là où la concurrence s’exerce, elle porte sur l’accès aux services d’urgence, sur l’adressage par les médecins traitants en ville, sur les délais d’accès aux soins et sur le prix des prestations annexes, remboursées en tout ou partie par les assurances complémentaires de santé. La prise en charge des soins par l’assurance maladie relève toujours de deux échelles tarifaires différentes, puisque, dans le secteur privé à but lucratif, les honoraires des médecins exerçant à titre libéral sont pris en charge séparément.
Un contrôle plus poussé de l’activité libérale des praticiens hospitaliers
La Cour des comptes cible particulièrement les praticiens du secteur public, qui peuvent exercer au sein de l’hôpital, sous certaines conditions, une activité́ libérale avec dépassement d’honoraires. Elle souhaite qu’une clarification soit faite sur l’ensemble du territoire national sur ce point au nom de l’égalité d’accès financière, géographique et temporelle par rapport à leurs besoins, quel que soit le statut de l’établissement en mesure de les prendre en charge. Elle prône pour un plafonnement du revenu de l’activité́ libérale par rapport aux revenus de l’activité́ salariée des praticiens, en lien avec leur temps de travail et le nombre d’actes effectués, ce qui est peu vérifiable et insuffisamment contrôlé.
Une demande de participation active à la permanence des soins pour le secteur privé
Elle souhaite également que les critères du service public hospitalier soient assouplis pour permettre d’accroître l’offre, en soumettant les autorisations délivrées aux établissements privés. Cela passe par une participation, sur un territoire, à la permanence des soins, par la coopération avec d’autres établissements au travers du partage de plateaux techniques, par une mutualisation des ressources humaines et des équipements rares ou une tarification sans reste à charge pour le patient après intervention de son assurance complémentaire de santé.
Mieux évaluer la pertinence des soins à l’échelle territoriale
La Cour envisage, à ce titre, de renforcer l’arsenal des outils d’analyse et des mesures juridiques des ARS afin de stabiliser cette nouvelle approche centrée sur les besoins à satisfaire de la population, avec une meilleure identification, dans les plans régionaux de santé, des insuffisances de l’offre par rapport à la demande à l’échelle territoriale, sociale et temporelle.
Dans le même ordre d’idées, elle remarque que la pertinence des soins hospitaliers, n’est pas optimale, l’ampleur des écarts entre les pratiques, dans certains départements, et la moyenne nationale méritant qu’une analyse des activités atypiques soit conduite par le Ministère de la Santé et de la Prévention. À l’inverse, elle trouve le mécanisme d’incitation financière à la qualité, développé par la HAS, trop complexe et difficile à appréhender par les professionnels de santé et les établissements.
Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
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@bbenk34.