vendredi 4 novembre 2016, par
En amont des Troisièmes Journées Francophones de Recherche en Soins (JFRS), les 1er et 2 décembre prochains, nous avons rencontré Yann Bubien, Directeur Général du CHU d’Angers et Délégué régional de la FHF en Pays de Loire notamment, mais aussi instigateur principal de cet événement. Il parle avec passion de la place que doit prendre la recherche paramédicale dans l’environnement sanitaire, en coopération avec les processus scientifiques médicaux.
Cadredesante.com : Le CHU d’Angers organise les 3èmes Journées Francophones de Recherche en Soins (JFRS). Comment avez-vous eu l’idée de créer un tel événement ?
Yann Bubien : J’ai toujours souhaité développer la recherche en soins. Cette pratique, qui est très développée dans les pays anglo-saxons, m’a toujours intéressé et, dès 2008, à l’époque où j’étais Directeur de cabinet adjoint de Roselyne Bachelot au Ministère des Affaires sociales et de la Santé, je travaille sur ce thème. Nous avons créé à l’époque, les Programmes Hospitaliers de Recherche infirmier et paramédical (PHRIP) en concomitance avec la réforme du LMD pour la formation initiale des métiers paramédicaux. J’ai également travaillé en Angleterre et j’ai été frappé par la place des paramédicaux dans la recherche, avec des masters et des doctorats. Cela m’a convaincu de l’importance de cette notion et le grand champ des possibles qu’elle ouvre.
« Il s’agit de créer une synergie entre les médecins et les paramédicaux »
CDS.com : Vous avez donc mis vos idées en pratique à votre arrivée à la Direction du CHU d’Angers ?
Y.B. : Tout à fait. À mon arrivée en 2011 au CHU d’Angers, j’ai souhaité mettre en application sur le terrain tout ce que j’ai pu observé auparavant au niveau national, notamment au gouvernement, et international. Je voulais lancer une vraie dynamique en termes de recherche en soins en lançant un axe de travail, auprès des cadres de santé de l’établissement dédié à ce thème. Il s’agissait d’impliquer les soignants bien sûr, mais aussi les médecins afin de créer une synergie. Le Pr Mercat, qui s’occupait de la recherche médicale au CHU d’Angers, a d’ailleurs bien voulu se mettre à disposition pour superviser son versant paramédical. C’est ainsi que la Maison de la recherche du CHU d’Angers a accueilli également des soignants chapeautés par Laurent Poiroux, un cadre de santé de l’établissement et impliqué lui-même dans un doctorat de recherche.
CDS.com : Les JFRS sont donc dans la continuité de votre volonté de développer cette pratique ?
Y.B. : Effectivement, nous avons commencé à réfléchir à la tenue d’un colloque national sur ce thème en 2012. Les premières JFRS se sont tenues en 2013 et nous avons découvert à cette occasion qu’il y avait, chez les soignants, toutes filières confondues, une réelle appétence. J’ai participé à beaucoup de colloques et de congrès, et là, j’ai tout de suite senti que ça marchait. Nous avons réuni, dès la première année, quelques 400 participants, et autant lors de la deuxième session en 2015. Nous passons cette année à un rythme annuel, mais cela représente beaucoup de travail si l’on veut garder un niveau de qualité équivalent aux années précédentes et proposer un programme pointu. Et le niveau sera encore excellent pour cette édition, avec notamment des acteurs majeurs de notre recherche en soins, comme Chantal Eymard ou Monique Rothan-Tondeur.
« La recherche en soins relève d’un processus scientifique spécifique »
CDS.com : Vous parlez avec beaucoup de passion de cette thématique. Êtes-vous un ancien soignant vous-même ?
Y.B. : Pas du tout. Mais oui, j’en parle avec passion parce que je sens que c’est important. J’ai d’ailleurs initié au CHU d’Angers des PHRIP qui sont considérés de la même manière que les projets de recherche médicale. De même que j’ai nommé, dans l’organigramme de l’établissement, un Directeur de soins dédié à la recherche en soins. Il s’agit de faire connaître au plus grand nombre les apports de la recherche en soins, mais aussi informer sur les processus de recherche et accompagner les professionnels qui souhaitent faire cette démarche. Bien évidemment, tout le monde ne peut pas faire de la recherche. Il faut une volonté, un goût et une vraie maîtrise scientifique. Mais je souhaite que tous les étudiants aux métiers paramédicaux, qui réalisent dans ce cadre un premier travail de ce type pour leur mémoire notamment, soient initiés assez tôt à la recherche en soins qui relève d’un processus spécifique incluant par exemple une méthodologie d’inclusion des malades. Ce processus doit être accompagné par un spécialiste du sujet.
CDS.com : Une fois que les chercheurs ont acquis cette méthodologie, se pose la question du financement de la recherche. Quelles sont les sources de ce financement ?
Y.B. : Les financements proviennent tout d’abord, nous l’avons évoqué, des PHRIP au niveau national. Ils peuvent également faire l’objet d’un appel d’offre en interne dans les établissements. Il faut savoir par exemple que le CHU d’Angers octroie une enveloppe annuelle de 300 000 € à la recherche, dont 45 000 € pour la recherche en soins. Cela participe bien évidemment de l’accompagnement que l’on propose aux candidats chercheurs, de même que le soutien de la Direction des soins ou de la vigilance des cadres de santé dans un souci de repérer, dans les services, les soignants qui seraient motivés pour initier la démarche.
CDS.com : En conclusion, comment évaluez-vous l’importance de la recherche en soins dans son environnement ,
Y.B. : Pour moi, la recherche en soins n’est pas un gadget. Il s’agit d’un mouvement de fonds qui va dans le sens de l’histoire, qui promeut les métiers paramédicaux et participe du rayonnement d’un établissement de santé. Je souhaite que ces 3èmes JFRS soient le symbole du dynamisme des paramédicaux en France.
Propos recueillis par Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
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