Hôpital aimant : quelle attractivité pour les établissements ?

mardi 16 novembre 2021, par Dominique Combarnous

Une session du Salon infirmier 2021 a eu pour sujet principal l’Hôpital magnétique. Ce concept a été expliqué, à cette occasion, par Christophe Pascal, qui en a énuméré les avantages mais aussi les pièges. La Présidente de la FNESI a ensuite communiqué sur les attendus des étudiants infirmiers, après quoi le coordonnateur des soins du CHU de Bordeaux a démontré que cet établissement avait initié les actions nécessaires pour devenir magnétique.

Depuis plus de neuf mois, le comité scientifique du salon infirmier (dont fait partie l’ANCIM) a travaillé sur le programme des conférences pour l’événement qui a eu lieu du 8 au 10 novembre 2021. Le choix d’organiser une session sur l’attractivité des hôpitaux, sous la forme d’une table ronde, a été conforté par l’actualité.

<Un contexte peu engageant pour les futurs soignants

En effet, le débat sur « les fermetures de lits » dues aux tensions sur les effectifs médicaux et les paramédicaux se déroule dans un contexte d’intensification du travail, diminution de la durée moyenne de séjour, poly-pathologie des patients de plus en plus âgés et une image des soignants sur leurs conditions de travail dégradée (absentéisme, d’où des retours sur repos intempestifs, qui imposent des exercices à flux tendus).

Pendant les différentes crise COVID, les soignants ont fait preuve de réactivité et d’agilité. Pour une fois, ils étaient autonomes, à la manœuvre, ce sont eux qui savaient ce qu’il fallait faire ! Pour eux cette prise en charge avait un sens jusqu’à ce qu’ils ressentent l’épuisement dû au vagues successives et, progressivement, ils ont lâché prise. Même si, actuellement, il n’y a pas un grand exode hospitalier, il existe des difficultés de recrutement bien réelles, aggravées par l’absentéisme. Les soignants ressentent un décalage entre le métier rêvé et la réalité de terrain. Ainsi le manque de stabilité des équipes fragilise la qualité et la sécurité des soins.

Qu’est-ce qu’un hôpital magnétique comment peut-on ont l’aimer ?

Christophe Pascal, Directeur de l’IFROSS, a entamé la table ronde par une présentation de l’hôpital magnétique tel qu’il est appliqué aux États-Unis. Après avoir relativisé sur certaines données notamment le nombre d’IDE qui a doublé en France depuis 20 ans et un effort financier inédit pour le Ségur de la santé. Cependant, la compensation financière des professionnels n’est pas la seule chose qui peut faire qu’un hôpital est attractif. Il est nécessaire de repenser les organisations en associant davantage les soignants et en redonnant du sens. Pour se faire, il a fait quelques suggestions :

  • « Des processus de prise en charge repensés pour intégrer des nouveaux acteurs : IPA, IA
  • Le réinvestissement du projet de service comme creuset des réflexions sur les objectifs et pratiques cliniques partagées ;
  • Des modes de gouvernance d’équipes à revisiter : participation, portages de projets et association aux décisions ;
  • Des modalités de progression de carrière et de mobilité interne à questionner ;
  • Un cadre entrepreneurial à construire ou renforcer ».

En complément, Christophe Pascal a rappelé que le Lean management peut être un outil, à condition qu’il soit employé pour la qualité et non pour des économies en personnel afin que l’on étudie également la notion d’entreprise « libérée ».

Pourquoi les nouveaux diplômés boudent-ils les structures hospitalières ?

Mathilde Padilla, Présidente de la FNESI (Fédération Nationale des Étudiants en Sciences Infirmières) a eu quant à elle un discours très positif. Elle parle d’abord de la formation, qui permet aux étudiants en soins infirmier de découvrir les lieux de stage, puisqu’ils ont autant d’heures de stage que de cours. Elle précise que dispenser un encadrement de qualité donne une attractivité certaine, ainsi le slogan de la FNESI est : « Un stage qui se passe bien, c’est un professionnel qui revient ». Il faut, selon elle, améliorer la formation des tuteurs afin d’avoir un encadrement de qualité. Néanmoins, quand il manque du personnel dans les unités, les étudiants ressentent la tension et même, s’ils peuvent souvent aider dans la réalisation des soins, leur formation en pâtit et donne moins envie au futur professionnel de travailler dans un service où il manque du monde.

Selon l’enquête réalisée par la FNESI, les locaux dans lesquels on exerce ont leur importance. Ainsi, avoir les moyens humains et matériels est synonyme de bonnes conditions de travail et présage d’un environnement serein pour débuter sa carrière. L’ambiance de travail est également évoquée, les étudiants entre eux se donnent les informations sur les stages et ils apprécient quand ils participent à la vie du service. L’esprit d’équipe est plébiscité pour postuler sur un poste afin d’être épanoui dans son travail.

En ce qui concerne les conditions d’embauche, Mathilde parle de la stagiairisation rapide comme un facteur déterminant alors même que, dans la salle, des cadres supérieurs témoignent de jeunes professionnels qui souhaitent être mobiles et rester contractuels pour pouvoir partir le plus souvent à l’étranger. Mathilde explique également que les nouveaux professionnels attendent des propositions de formation pour améliorer leurs compétences et leur évolution professionnelle.

Comment améliorer l’attractivité des structures hospitalières ? Exemple du CHU de Bordeaux

Luc Durand, coordonnateur général des soins du CHU de Bordeaux, nous fait part de son expérience et notamment de la mise en place dans son établissement d’une cellule « #bienvenue au soignants » avec comme préalable une adresse unique et une identité visuelle du CHU. Les missions de cette cellule sont de centraliser et orienter les candidatures avec une prise en charge personnalisée, réactive et en adéquation avec les compétences et appétences des postulants.

Le CHU a mis en place des campagnes de communication (forum digital, portraits des métiers paramédicaux, vidéos, affiches, cartes de visite, questionnaire de satisfaction pour les ESI). Chaque courrier est traité avec un courriel type et une fiche de souhaits, un accusé de réception est systématiquement envoyé aux candidats. Luc Durand note que les recrutements au CHU de Bordeaux ont progressé de 16,24% entre 2017 et 2020. Le plan d’action tient compte du contexte actuel et la performance des process permet des recrutements qui mettent en adéquation l’offre et la demande.

L’efficacité de la communication et du lien avec les écoles est primordiale. A titre d’exemple, des réflexions sont engagés pour des allocations de fin d’étude pour les troisième année IDE, le développement de l’apprentissage et la stagiairisation directe sur certaines spécialités. Le CHU de Bordeaux tente d’améliorer les conditions de travail et de conciliation vie privée / vie professionnelle avec des études en cours sur le travail de nuit, la compensation de l’absentéisme, d’éventuelles organisations de temps de travail dérogatoires et également des plans d’action QVT. Des projets sont en cours pour une plateforme de recrutement dématérialisée et encore plus de visibilité du CHU.

Pour conclure cette conférence très dynamique, quatre points nous semblent essentiels :

  • Un mode de relations collégiales entre médecins et paramédicaux où chacun est reconnu et respecté dans son mode d’expertise
  • Un supérieur hiérarchique avec un leadership empreint d’humanité, de stimulation exigeante et de bienveillance pour l’amélioration des compétences de l’équipe dont il a la charge
  • Une gouvernance avec un management participatif laissant l’autonomie et la capacité d’expression des professionnels à tous les niveaux de décisions
  • Et enfin, la nécessité de développer auprès des professionnels un sentiment d’appartenance et de performance individuelle et collective.

Alors, ces soignants seront mobilisés, satisfaits, impliqués et ils resteront dans leur structure.

Dominique Combarnous
Cadre supérieur de santé
Hospices Civils de Lyon (HCL)
Présidente de l’ANCIM


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