vendredi 13 janvier 2023, par
Epuisement, arrêts maladies, pénurie de personnel, manque de matériel... pour témoigner de la crise profonde qui frappe l’hôpital, trois infirmiers, en psychiatrie, en pédiatrie et en gériatrie, ont accepté de nous raconter leur combat quotidien pour tenter d’exercer dignement leur métier.
Tenir bon ou quitter le navire. Tel est le choix auquel sont confrontés les soignants de l’hôpital public.Malgré l’amour qu’ils portent à leur métier, malgré leurs convictions, leur attachement au service public, ils sont à bout. Ils racontent ici leurs journées harassantes, leur souffrance et leur inquiétude pour l’avenir et pour leurs patients.
Benjamin, infirmier aux urgences psychiatriques de Nantes
Le service accueille des patients adultes à partir de 15 ans et 3 mois. Les difficultés. Depuis le COVID, les consultations ont significativement augmenté : + 40% pour les mineurs souffrant généralement d’un syndrome dépressif ou en crise suicidaire. Or, leur orientation s’avère très compliquée en l’absence de moyens d’hospitalisation. Ces enfants sont soit renvoyés chez eux, soit placés dans des services de psychiatrie adulte. Des situations complexes qui demandent aussi davantage de temps médical que nous n’avons pas, avec 1,5 médecin en journée contre 4,5 à temps plein normalement et un seul médecin de garde la nuit (de 18h30 à 8h30). Résultat : les délais d’attente en soirée ou la nuit sont parfois de 7 à 8h avant de rencontrer un psychiatre. Au-delà de l’adolescent, il y a aussi la famille inquiète à recevoir et une crise suicidaire à gérer. Autre crainte : d’ici quelques jours, nous n’aurons plus de chef de service. Les nombreux départs et le non remplacement des psychiatres d’urgences implique qu’à l’avenir, nous, infirmiers, fassions sortir des patients sans avis médical - une énorme responsabilité, sans formation supplémentaire.
Le manque de moyens. Régulièrement, des patients sont adressés aux urgences avec une demande d’hospitalisation sous contrainte (ce qui implique un péril imminent) or nous n’avons pas les moyens suffisants de les surveiller efficacement. Résultat : ils fuguent assez régulièrement, parfois avec des issues dramatiques.
L’état d’esprit. Aux urgences générales, les collègues sont assez démissionnaires. Autrefois ils se mobilisaient, maintenant ils sont découragés. C’est aussi la fuite des paramédicaux : je ne connais pas de collègue aujourd’hui qui ait l’intention de rester aux urgences sur du très long terme. A cause de ces pénuries de personnels, on se retrouve avec des paramédicaux jeunes, inexpérimentés dans des soins critiques...(ce qui n’est bon ni pour eux, ni pour les patients). La nouveauté, c’est que l’hémorragie touche aussi les médecins-urgentistes depuis quelques mois, à la recherche de conditions de travail moins pénibles. Le sentiment général, c’est quand même la fuite de l’hôpital public contre la volonté des soignants - ils sont attachés au service public mais, après les différentes crises, ils arrivent à bout de souffle.
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La rédaction infirmiers.com