La véritable valeur ajoutée des patients partenaires et experts

jeudi 15 octobre 2020, par Bruno Benque

Un article récent au sujet des patients partenaires avait créé la polémique et avait dû être dépublié. Mais une rencontre constructive avec des acteurs majeurs de cette communauté nous ont montré l’importance que ces intervenants ont prise dans la formation des professionnels de Santé d’une part, et dans l’accompagnement des patients et des soignants à l’hôpital d’autre part. Explications...

La question du patient expert, ou du patient partenaire, selon l’environnement dans lequel on se place, est peu connue de la majorité des professionnels soignants, ces nouveaux acteurs du système de Santé n’étant pas présents dans toutes les institutions.

Le patient partenaire rémunéré déclenche la polémique

Elle est d’autant peu connue que nous avions commis cet été, dans ces colonnes, une tribune à leur égard dans le cadre d’un projet « Patient-partenaire en oncologie » lancé par l’ARS Nouvelle Aquitaine qui prévoyait de les rémunérer en échange de leur action envers les malades hospitalisés atteints de cancer. La façon dont nous avions traité le sujet, avec un ton condescendant au début, et franchement irrévérencieux et polémique en conclusion, avait provoqué la désapprobation de certains, l’ire de quelques autres, et un flot discontinu d’insultes et d’injures sur Twitter de nombreux irréductibles, comme internet peu parfois en générer. Ne cherchez pas cet article dans notre historique, car nous avons dû le dépublier suite à ce déchainement de violence.

Une rencontre pour dissiper les malentendus

Le tempête passée, il était nécessaire de rouvrir le dossier à distance et d’identifier les points d’incompréhension, d’ignorance ou les idées préconçues qui avaient creusé un tel gouffre entre la situation décrite et la réalité de terrain. À l’initiative de Chantal De Cingly, Directrice d’hôpital qui est une bien connue des cadres de Santé, nous avons pu rencontrer deux acteurs majeurs de la communauté des patients partenaires, Catherine Cerisey, atteinte d’un cancer du sein il y a vingt ans, et le Dr François Blot, Anesthésiste réanimateur à l’Institut Gustave Roussy (Villejuif), tous deux membres d’« Associons nos savoirs », qui œuvre pour l’intégration des patients dans la formation initiale et continue des professionnels de Santé.

Des patients experts forment des professionnels de Santé

Voilà déjà une information nouvelle : les patients experts participent à la formation initiale des professionnels de Santé, notamment des médecins, et ils sont plus nombreux que ce que l’on ne croit. « J’interviens effectivement en tant qu’enseignante à l’Université Paris XIII à Bobigny auprès des étudiants en médecine et en kinésithérapie, m’annonce d’emblée Mme Cerisey. Au-delà de mon histoire de patiente, j’ai suivi des formations, acquis, au fil du temps, une expertise qui me permet aujourd’hui de remplir cette mission. Il est normal que je sois rémunéré en retour ! » Présenté comme cela, nous ne pouvons qu’être convaincus de la pertinence de la rémunération de ces intervenants dans ce contexte.

Un second œil pour améliore la prise de décision partagée

Pour le Dr Blot, la participation des patients partenaires pour la pratique médicale à l’hôpital est un avantage majeur. « Avant, je consultais mes patients d’un seul œil, a-t-il remarqué. Le regard du patient et les observations qu’il a tiré de son parcours de patient lui confèrent une expertise authentique pour l’éducation thérapeutique ou l’accompagnement des malades. C’est mon second œil ! Il n’y a aucune preuve scientifique à cela mais je suis persuadé que ce prisme différent m’a fait progresser dans la prise de décision partagée. » Cette affirmation nous a mène à nous demander, ici, s’il n’y a pas de réelles lacunes dans la formation initiale que les médecins, et tout les professionnels de Santé par extension, ont reçue depuis des années.

Des patients partenaires pour assister les personnels soignants

Le Dr Blot a évoqué ensuite la valeur ajoutée de la participation des patients dans la qualité de vie des soignants qui, outre la feuille de paie, est conditionnée par le sens donné à leur mission ainsi que par la qualité des soins dispensés. « Sans compter, a-t-il poursuivi, que les actes récurrents que l’on pratique parfois pourraient être supprimée si un patient partenaire avait effectué le travail d’information et d’éducation thérapeutique que l’infirmier n’a pas le temps de faire aujourd’hui ! » Les infirmiers apprécieront... Reste qu’il faudrait donc que chaque hôpital puise disposer de patients partenaires ayant été victimes chacun d’une pathologie rencontrée dans l’ensemble des établissements de Santé. Et comme ces intervenants seront rémunérés, cela risque de faire beaucoup.

Mais trêve de polémiques, nous avons bien évalué, grâce à cette rencontre constructive, l’importance que peuvent prendre les patients experts, formateurs des professionnels de Santé, et des patients partenaires accompagnant les malades, mais également les soignants, au quotidien au sein des hôpitaux. Dont acte...

Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
bruno.benque@cadredesante.com
@bbenk34


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