lundi 28 mars 2022, par
Alors que le Ségur de la Santé a permis aux instituts de formations paramédicales d’augmenter leurs quotas d’étudiants, les objectifs ne sont pas atteints, tant en termes de taux de remplissage des promotions que de poursuite du cursus de formation. Une enquête du CEFIEC cible, entre autres, les erreurs d’orientation des candidats et la nécessité de mieux dimensionner les instituts pour qu’ils puissent accueillir ce surcroît d’étudiants.
Le secteur de la Santé est lourdement impacté, aujourd’hui, par un manque criant de professionnels, tant médicaux que paramédicaux, alors que les besoins sont grandissants, sous l’effet conjugué du vieillissement de la population, avec son corollaire de l’autonomie, et des maladies chroniques, problème exacerbé ces dernières années par la pandémie de COVID-19.
Une démographie paramédicale en crise
Les raisons à cette pénurie sont connues, entre désaffection des métiers du soin, pour cause de conditions de travail difficiles et de rémunérations pas encore à la hauteur des attentes, et défaut d’attractivité pour des métiers qui ne sont pas en phase avec une tendance générale au repli sur soi et à la pensée auto-centrée. Pour essayer d’enrayer ce phénomène qui vide peu à peu les hôpitaux de leur substance, le législateur a, lors du Ségur de la Santé, mis en place des mesures sensées améliorer les rémunérations des personnels soignants ainsi que leurs conditions de travail. Dans le même temps, il a augmenté le nombre de places agréées dans les instituts de formation aux métiers paramédicaux, pour certaines filières, avec notamment une augmentation de 6 000 places pour le seul métier d’infirmier, afin de renforcer les effectifs.
Enquête sur le processus de recrutement des étudiants infirmiers
Mais ces dispositions en faveur d’un plus grand nombre d’étudiants vont-elles automatiquement augmenter les embauches à la fin des cursus de formation ? C’est pour répondre à cette question que le Comité d’Entente des Formations Infirmière et Cadre (CEFIEC) a lancé, du 5 décembre 2021 au 4 janvier 2022, une enquête, auprès des instituts de formation adhérents, intitulée « Profil des étudiants en soins infirmiers dans les instituts et leur employabilité ». Menée en collaboration avec le Ministère des Solidarités et de la Santé, cette étude vise à identifier les entrées en formation en soins infirmiers et à suivre le parcours des étudiants qui n’aboutit pas toujours à la prise d’un poste au bout du cursus de trois ans. Car depuis l’intégration des formations paramédicales dans ParcourSup, les candidats se pressent aux portes des instituts mais leurs profils ne sont, dans certains cas, pas compatibles à une carrière soignante.
Les erreurs d’orientation issues de Parcoursup
Et l’enquête du CEFIEC confirme, chiffres à l’appui, cette évolution. Les 165 IFSI ayant répondu de manière complète au questionnaire ont ainsi fait remonter, pour la rentrée 2021, un nombre total de 18 008 places, dont 17 612 places ont été occupées, soit 97,80 %. Deux mois après la rentrée, 2271 étudiants ont quitté les instituts portant le taux de remplissage à 86,61 %, soit une perte de 12,9 % des effectifs étudiants. Le CEFIEC explique cette désaffection par l’erreur d’orientation pour des étudiants issus de ParcourSup, les candidats venant de la formation continue n’étant pas sujets à des abandons de formation aussi nombreux. Ceci pose évidemment la question de la pertinence de ce type de recrutement, voire de la nécessité de réaliser systématiquement des entretiens avant que les étudiants ne soient admis en formation.
Mais l’erreur d’orientation n’est pas la seule raison de la fuite des paramédicaux en herbe, puisque des motifs tels que la crise sanitaire, les difficultés d’encadrement ou les problématiques financières.
Dimensionner les instituts en adéquation avec l’augmentation du nombre d’étudiants
Enfin, puisque le Ministère a donné son feu vert pour redimensionner les promotions d’étudiants, il est nécessaire d’évaluer les capacités d’accueil dans les instituts pour absorber cette augmentation. L’enquête du CEFIEC montre que 71,5 % des instituts proposent entre 50 et 150 places, 17,75 % ayant une capacité d’accueil au-delà des 150 places. On observe également que 50 % des instituts de formation en soins infirmiers ont augmenté leur capacité d’accueil de 1 à 10 places et que 33% d’entre eux ont augmenté leur capacité d’accueil de plus de 10 places. Et il est possible, voire certain, que ces évolutions soient mises en œuvre sans augmentation de moyens immobiliers et de ressources humaines. Et ce, alors que les objectifs du Ségur de la Santé évoqués pour haut n’ont pas été atteints, l’enquête objectivant un cumul de 2363 étudiants supplémentaires avec un taux de 205 réponses, soit 57,42 %, ce qui correspond à 39,38 % des 6 000 places supplémentaires prévues dans le cadre des mesures prises par le Ségur.
Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
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