Un jardin amélioré pour favoriser la reprise cognitive en EHPAD

lundi 27 septembre 2021, par Bruno Benque

Le jardin a des vertus psychologiques connues depuis la nuit des temps. Mais un jardin « amélioré » peut rendre la raison aux patients touchés par la maladie d’Alzheimer, comme le montre une étude scientifique française publiée dans la Revue Alzheimer’s Research & Therapy. Les auteurs de l’étude ont d’ailleurs expliqué leur démarche dans le web magazine « The Conversation », annonçant que ce travail était appelé à en engendrer d’autres intégrant des mesures d’interactions entre les sujets et les modules d’activités installés dans ces jardins.

Les managers exerçant en EHPAD sont, et les médecins coordonnateurs avec eux, en perpétuelle recherche de solutions susceptibles d’améliorer l’état cérébral des résudents touchés par une affection liée à la dégénérescence cognitive.

Les vertus ancestrales du jardin

Et si c’était dans le jardin de la résidence que la réponse se trouvait ? Dans un texte publié dans le web magazine « The Conversation », Étienne Bourdon, Doctorant au Laboratoire Éducations et Pratiques de santé (LEPS) de l’Université Sorbonne Paris Nord et la Dr Joel Belmin, Chef de service à l’hôpital gériatrique universitaire Charles Foix (Ivry-sur-Seine) et Professeur de gériatrie à la Faculté de Médecine Sorbonne (Paris), émettent l’idée que l’aménagement du jardin aurait un effet bénéfique pour ces cerveaux fatigués. Ils rappellent en préambule les propriétés éducatives données par la religion chrétienne aux plantes et fleurs, la blancheur du lys, l’humilité du fraisier, ou la place privilégiée du jardin dans l’islam.

Des ateliers sensés améliorer les jardins des EHPAD

Des travaux du neuropsychologue Donald Hebb, de l’Université de McGill de Montréal, datant de 1946 sur des souris de laboratoire, suggérant que leurs fonctions cognitives s’étaient améliorées en les plaçant dans un environnement stimulant, a ouvert une voie pour nos deux chercheurs qui ont souhaité l’appliquer au concept de « jardin enrichi ». Il s’agit d’intégrer, dans le jardin classique d’un EHPAD contenant une forte proportion de patients atteints d’Alzheimer, des ateliers favorisant, pour ces résidents, une stimulation sensorielle et cognitive. Pour constituer la « matière active » du lieu, ils ont associé à leur démarche des neuropsychologues, « pour la description de l’univers cognitif et comportemental d’un patient Alzheimer », des ergothérapeutes, « pour assurer une ergonomie optimale aux modules », des psychomotriciens, « chargés de guider et faciliter la déambulation et des gestes dans le jardin », ainsi que des gériatres et des artisans, « capables de traduire les besoins des patients en objets concrets ».

Des résultats significatifs pour l’évolution cognitive des résidents Alzheimer

Ce projet a fait l’objet d’une étude clinique publiée dans la Revue Alzheimer’s Research & Therapy, et incluant 130 résidents atteints de la maladie d’Alzheimer de quatre EHPAD comprenant chacun un jardin classique et un jardin enrichi. Un groupe contrôle de résidents n’était pas incité à se rendre dans un jardin, tandis qu’un deuxième groupe recevait une information incitative pour se rendre dans le jardin classique plusieurs fois par semaine, de même pour un troisième groupe invité à se rendre dans le jardin enrichi. Au bout de six mois, ils ont observé des différences significatives dans le parcours cognitif des résidents. Et ce sont, vous vous en doutez, les résidents incités à fréquenter le jardin enrichi qui ont montré le plus de progrès alors que les résidents des deux autres groupes ont fait l’objet d’un déclin significatif.

Sortir les résidents, mais pas que...


Au final, ce travail nous montre qu’il est nécessaire de changer de paradigme. Ce n’est pas en faisant prendre l’air aux résidents lors des sorties au jardin que nous stimulons leur cerveau. Nous devons créer pour eux, dans ce jardin, comme dans tout autre lieu de vie de l’EHPAD, les moyens d’une reprise en main de leurs facultés cognitives. À cet égard, les chercheurs envisagent d’aller plus loin dans leurs travaux en mesurant la fréquence et la durée des interactions entre les résidents et les modules d’enrichissement mis en œuvre pour eux. Peut-être pourront-ils alors expliquer plus précisément les mécanismes qui s’activent dans ce cadre.

Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
bruno.benque@cadredesante.com
@bbenk34


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