Pour une meilleure visibilité et un renforcement de la ligne managériale paramédicale (PART. 2)

À l’heure où la gouvernance des établissements de Santé et médico-sociaux fait l’objet de toutes les attentions, tant au niveau des organismes de tutelles que du corps médical ou des patients, les cadres de santé et les directeurs de soins entendent affirmer ou consolider leur influence dans la politique des institutions au sein desquelles ils évoluent. C’est ainsi qu’un collectif issu des associations représentatives de ces métiers, l’ANCIM et l’AFDS, a élaboré un texte commun afin de partager sa vision de la ligne managériale paramédicale qu’ils entendent défendre. Après une première partie décrivant les trois niveaux de management, ils évoquent, dans cette seconde partie, le projet managérial tel qu’ils le conçoivent, ses atouts et les outils pour les mener à bien.

Développer un projet managérial au service du renforcement de la ligne managériale paramédicale

Le projet managérial s’appuie sur des valeurs professionnelles communes qui soutiennent notre engagement dans la fonction de manager, centrées sur les bonnes pratiques et la réponse à la mission de soins performantes aux patients qui leur est confiée. Ces valeurs ont pour finalité de contribuer par ailleurs à l’épanouissement de chaque professionnel dans ses missions.
Il se décline autour :

  • DU RESPECT : Être en proximité, connaitre et reconnaitre le travail des professionnels avec considération, individuellement et collectivement. Favoriser les temps d’échanges pour construire ensemble, accepter les débats et la remise en question. Le respect se décline à tous les niveaux de la ligne managériale pour être probant, visible et cohérent.
  • DE LA SOLIDARITE : Se « nourrir » de l’autre pour avancer en développant des réflexes de coopération. Mutualiser les outils, se transmettre les informations, partager les difficultés et les réussites, se soutenir dans les situations compliquées et trouver ensemble des solutions.
  • DU SENS DES RESPONSABILITES : Donner du sens au travail en cohérence avec les orientations du projet de soins. Veiller à l’équité. Avoir le courage du management au quotidien en ciblant la finalité patient dans un cadre de fonctionnement formalisé qui s’adapte au quotidien.
  • DE LA SATISFACTION AU TRAVAIL : Etre attentif à maintenir un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Encourager la créativité, l’autonomie, la responsabilisation par la délégation
  • DE LA CONFIANCE A PRIORI : Chaque membre de la ligne managérial pose cette confiance à priori permettant à chacun de s’exprimer avec ses compétences, ses potentiels, ses différences, ses expériences.

Le projet managérial intègre les évolutions liées à la dimension territoriale de la santé

Le positionnement du DS, des CSS évolue dans le cadre de la territorialisation, de la mutabilité permanente des organisations. De ce fait, les missions et périmètres sont différents selon les établissements. L’enjeu est de construire un pilotage qui permette de formaliser clairement les périmètres des missions, de comprendre l’articulation des différents projets (projet régional de santé, projet local de santé, projet d’établissement, projet médico-soignant...) et de maintenir le sens de l’action afin qu’il serve de fil rouge.

Un des autres atouts du projet managérial est de développer le sentiment d’appartenance

Le projet managérial au service du projet médico-soignant renforce la compréhension et l’alignement des encadrants sur le sens de l’action, la cohérence pour chacun d’eux et pour les équipes dont ils ont la responsabilité. La ligne managériale, ancrée dans le projet de soins médico-soignant et dans le projet managérial, fonde les conditions de la confiance de telle sorte que chaque décisionnaire, à son niveau de responsabilité, puisse participer activement à la gouvernance de l’établissement.

Les managers de proximité sont encouragés à impulser un management ouvert, participatif et structuré au sein de leurs équipes, ce qui engendre plus facilement l’engagement dans un projet commun. Par leur leadership, c’est-à-dire cette capacité à mobiliser, à fédérer les collectifs professionnels autour d’objectifs partagés, l’ensemble de la ligne managériale paramédicale pilote des objectifs complexes. La direction des soins s’attache à renforcer la connexion des dimensions stratégiques et opérationnelles avec le souhait de favoriser les relations interprofessionnelles et de développer la performance collective au bénéfice des équipes et des usagers.

Par ailleurs, partager une culture managériale c’est-à-dire une philosophie, des concepts, des outils, des pratiques, des expériences, se mettre d’accord, poser les enjeux.... renforce le sentiment d’appartenance des acteurs à la ligne managériale paramédicale.

Le sentiment d’appartenance, un sentiment d’identification ou d’attachement à un groupe, une communauté ou une organisation

Selon une étude menée par le cabinet Deloitte et publiée cette année, plus de 9 salariés sur 10 estiment que le sentiment d’appartenance est un boost pour leur engagement qui se construit alors plus facilement.

Le psychologue H.A. Maslow, dans sa pyramide, l’avait ciblé comme un besoin fondamental. Ramené à l’établissement de santé, il s’agit de l’attachement des professionnels à leur environnement de travail. Le système, dans son ensemble, leur donne le sentiment de faire partie intégrante d’un groupe social. Ce sentiment d’appartenance renforce l’estime de soi et permet un soutien social. Chacun construit son propre lien et véhicule les raisons d’être fier via un prisme, une histoire, des intérêts similaires, des valeurs et visions partagées ou encore une culture.

L’enjeu est de nourrir ce sentiment très individuel, en proposant des politiques, des actions ou encore des engagements communs. Le sentiment d’appartenance sous-tend qu’il y a de la confiance, de la bienveillance, de l’empathie, de la reconnaissance et du respect. L’une des composantes de ce sentiment d’appartenance est le fait de savoir que cette communauté sera là en cas de coup dur.

La fierté d’appartenance se présente désormais comme le fer de lance de la fidélisation, selon Stéphane Barbot, créateur du label « Le MUST employer » qui récompense les entreprises dont les salariés sont fiers : « Aujourd’hui, la différence ne se fait plus via le seul prisme du contrat de travail ou l’aspect pécuniaire. Cela se joue à un niveau plus subtil, quasi philosophique : chacun trouve la source de sa fierté dans le prestige d’une marque, son utilité, son histoire, ses valeurs, ses métiers d’excellence, ses actions, ses engagements sociaux et environnementaux... Partout où il y a du travail, il y a une fierté ».

Outre des valeurs et de l’appartenance, renforcer la ligne managériale paramédicale et développer plus fortement le sentiment d’appartenance des manageurs passe par le développement : la confiance à priori les uns envers les autres est à construire par nous même au sein de chacun de nos lieux d’exercice.

Donner de la force au projet managérial

Pour donner de la force au projet managérial, celui-ci doit intégrer des outils :

  • Un dispositif d’intégration ;
  • Des fiches de postes et une cartographie des compétences ;
  • Des réunions d’encadrement - Des rendez-vous individuels CDS ou CSS / DS ;
  • Des espaces de discussion, des cercles de réflexion ;
  • La définition d’une stratégie d’information et de communication sur le contexte, les projets, etc., partager une vision, susciter le sentiment d’appartenance pour construire une culture commune.

Pour créer des effets de leviers, des synergies et rechercher une dynamique managériale forte incluant l’autonomie et la participation à la décision attendue des managers paramédicaux, mettre en œuvre le projet managérial, les outils suscités engendreront des renforcements des comportements collectifs de construction et d’appartenance, les objectifs seraient les suivants :

  • Optimiser les pratiques managériales : il s’agit de renforcer les compétences managériales de l’encadrement pour encore mieux se positionner comme manager –leader porteur de sens ;
  • Appréhender collectivement le concept de « Prise de décision en santé et compétences émotionnelles » ;
  • Savoir construire des analyses de pratiques professionnelles : pour développer un savoir « analyser la situation de terrain » fondé sur ses expériences de manager, et développer des savoirs basés sur des compétences de management et des soft skills ;
  • Développer le savoir managérial : Management visuel ou management positif ou management bienveillant par exemple ;
  • Créer des espaces de discussion sur le travail de l’encadrement : délibérer sur le travail.

De l’alignement stratégique permettant la diffusion d’information en passant par la valorisation des réussites, la communication est partout. Le projet managérial, vecteur d’une communication constructive

La stratégie sur les projets, le contexte, l’actualité doit être connue de l’ensemble des managers. L’alignement stratégique favorise le partage du projet, des objectifs et des actions à suivre : « lorsque chacun a compris les objectifs à atteindre et la stratégie qui pilotera leur réalisation, les efforts et les initiatives seront tous alignés sur les processus de transformation à mettre en œuvre » *. Il s’agit d’un processus descendant et ascendant : chacun a un rôle à jouer.

Pour améliorer la communication au sein de la ligne managériale paramédicale, plusieurs principes peuvent être déclinés dans le projet managérial :
Promouvoir la régularité et la clarté : un engagement à assurer des réunions périodiques en laissant un temps pour les questions/réponses et les échanges, des rapports de suivi, des mises à jour (e-mails ou autres), des appels téléphoniques, etc. ;
Encourager et prendre l’engagement de s’écouter : pour améliorer la compréhension mutuelle des préoccupations et points de vue de chacune des parties avec attention, respect et ouverture d’esprit ;
Clarifier les objectifs (SMART) : en ce qui concerne les rôles et responsabilités de chacun, et, éviter les malentendus ;
Favoriser une culture de feedback et reconnaître les contributions de chacun ;
Établir des annonces à intervalle régulier et par de multiples supports : donner du factuel, des chiffres, valoriser, etc.

De multiples supports peuvent être utilisés afin de valoriser l’engagement et les talents internes :

  • Des temps de réunion modernisés : avec par exemple, 2 réunions/an organisées uniquement par les CSS et CS (ordre du jour), déplacer les lieux de réunion, associer les IFCS ;
  • La création d’un journal interne réservé à la ligne managériale paramédicale ;
  • La création de vidéos et/ou podcast.

Le projet managérial vise donc à accompagner les acteurs de la ligne managériale paramédicale dans leurs activités collectives au bénéfice de la prise en charge des patients. Il se définit par les valeurs partagées, par les objectifs communs, les outils, etc.
Ce système managérial permet de déployer le Projet Médico-Soignant, les interactions de l’encadrement avec les directions fonctionnelles, les niveaux de compétences recherchés, l’outillage managérial.

Accompagner les grands changements avec ses caractéristiques aléatoires et l’intensité des phénomènes comme le contexte d’incertitude et d’imprévisibilité est le défi de la ligne managériale paramédicale et le projet managérial en constitue une réponse.

Nous sommes persuadés que l’intelligence collective, nos façons de faire, doivent nous permettre de résister aux assauts des crises et de pouvoir travailler dans un climat de confiance. Les managers paramédicaux savent se servir des situations pour saisir les opportunités et construire. Il nous faut désormais nous appuyer sur nos identités partagées, nos compétences, nos objectifs, pour répondre ensemble à nos missions en nous articulant avec tous les acteurs du soin.

« Se réunir est un début, rester ensemble est un progrès, travailler ensemble est la réussite » Henry FORD.

Myriam Merlet, cadre de santé, Centre Hospitalier de Dax-côte d’Argent (ANCIM) ;
Sylvain Uzac, cadre de santé, CHU Bordeaux (ANCIM) ;
Silouane Flament-Poli, cadre de santé, APHP CH Tenon (ANCIM) ;
Frederic Soler, cadre de santé, CHU de Nîmes (ANCIM) ;
Dominique Combarnous, Présidente ANCIM ;
Barbara Robert, Directrice des Soins (DS), Coordinatrice Générale des Soins (CGS), CHD Vendée (Vice-présidente AFDS) ;
Sylvain Boussemaere, DS, CGS CHI Val d’Ariège (Vice-président AFDS) ;
Aurélien Cadart, DS, CGS CH Calais (chargé de communication ) AFDS ;
Laurence Laignel, DS, CGS CHU Angers (présidente AFDS).


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