jeudi 15 décembre 2022, par
Comme cela est souvent le cas dans ce type de document, la liste des trente leviers d’action pour agir ensemble à l’AP-HP est souvent empreinte de démagogie. le paragraphe relatif à l’embauche massive de postes de fonctions support semblent totalement inappropriées, l’urgence étant l’augmentation du nombre de soignants. Mais certaines des dispositions comprises dans ce texte relèvent du bon sens et du pragmatisme, notamment celles relatives à l’intégration des jeunes professionnels ou à l’attractivité des fonctions managériales.
Le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), Nicolas Revel, en poste depuis le 4 juillet 2022, a débuté son mandat en initiant une phase d’écoute des professionnels pour comprendre leurs attentes et leurs priorités et à l’issue de laquelle il avait identifié « 30 pistes d’actions pour les 12 prochains mois ».
Trente leviers d’amélioration du fonctionnement de l’AP-HP
Ces pistes font aujourd’hui l’objet d’un document recensant « 30 Leviers pour agir ensemble », envoyé le 13 décembre 2022 à l’ensemble des professionnels de l’institution. Il s’agit d’une liste à la Prévert de projets et de plans qui sont sensés parler à l’ensemble des agents de l’AP-HP et qui, de ce fait, ont parfois le goût de la démagogie et semblent irréalisables en l’état actuel des finances de l’AP-HP et des dispositions dans lesquelles se trouvent ses agents. Parmi ces propositions, il s’agit de profiter de la variété́ des activités de l’AP-HP pour fidéliser les professionnels en leur offrant des parcours plus riches, limiter leurs temps de transport en visant 1 200 attributions de logement par an entre 2023 et 2027, soit le double rapport à la moyenne des dernières années, reconnaître le rôle majeur des équipes de nuit et mener des actions concrètes sur leur alimentation ou sur leur intégration dans le collectif du service.
Certaines mesures difficilement applicables
Dans le même ordre d’idées, Nicolas Revel souhaite mieux concilier les vies professionnelle et personnelle des agents de l’AP-HP en leur permettant de choisir un schéma horaire qui leur convient, prévoir une nouvelle organisation plus favorable à la cohésion entre médecins et paramédicaux au sein des services ou soutenir les chefs de service et les cadres de santé dans l’exercice d’un management bienveillant pour les équipes et s’organiser collectivement pour réagir plus vite en cas de difficulté. Autant de mesures difficilement applicables car impossibles à mettre en œuvre ou allant à contre-courant des évolutions ou des désirs de certains.
Des actions sur les étudiants en Santé et sur l’engagement de leurs tuteurs
Certaines de ces propositions sont, au contraire, frappées sous le sceau du bon sens et du pragmatisme. Ainsi, pour réussir une campagne de recrutement ambitieuse en 2023 et 2024 sur les métiers en tension, il prévoit d’augmenter le nombre de stages de fin d’études offerts au sein de l’AP-HP, de signer des contrats d’allocations d’études (CAE) dès la deuxième année de formation ou garantir l’existence de parcours d’intégration dans tous les services pour permettre aux jeunes professionnels d’achever leur apprentissage sur le terrain. Il mise ainsi sur une prime de tutorat de 172€ nets par mois attribuée aux professionnels expérimentés s’engageant à encadrer des stagiaires et jeunes professionnels, sur des formations internes dans tous les services avec un label « service apprenant » pour ceux qui sont particulièrement performants ou innovants dans la formation de leurs professionnels.
Des créations de postes totalement inappropriées
En termes de Qualité de Vie au Travail, le DG de l’AP-HP aspire à permettre aux équipes médicales et paramédicales de se libérer au maximum des tâches administratives, logistiques et techniques avec le lancement, en janvier 2023, d’un appel à projets auprès de tous les services de soins et médicotechniques, pour proposer un recrutement de logisticiens, de bed managers, de coordonnateurs notamment, soit la création d’au moins 300 postes en 2023 et 300 postes en 2024 et l’expérimentation, en 2023, d’un portail informatique permettant à chacun d’exprimer un besoin administratif, logistique ou technique. Une mesure somme toute inappropriée, l’urgence étant , d’une part, de recentrer les activités des services logistiques, techniques et administratives au service des unités des soins et, d’autre part, de dédier ces 600 postes prévus à des activités spécifiquement soignantes.
Des mesures relatives aux missions, à la rémunération et au temps de présence des cadres
Enfin, les leviers d’action de l’AP-HP concernent aussi les cadres de santé, notamment l’amélioration de l’attractivité́ du métier, notamment en limitant la proportion des « faisant-fonction » et en leur attribuant des bonnes pratiques avec une durée maximum d’exercice et une cartographie des postes accessibles, une meilleure harmonisation, au sein de l’institution, de la permanence de l’encadrement (nuit et week-end), en travaillant sur les missions, la rémunération et le temps de présence des cadres. Il s’agit également de simplifier les modalités et de raccourcir les délais du concours sur titre d’accès aux fonctions de cadre de santé, de proposer des modalités de rémunération en contrepartie de missions supplémentaires et enfin de réfléchir à des références de ratios d’encadrement pour garantir la présence du bon nombre de cadres de proximité.
Le programme est copieux, certainement trop pour en espérer des évolutions susceptibles de faire évoluer ce lourd système de manière significative.
Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
bruno.benque@gpsante.fr
@bbenk34.
Partager cet article
